CAMP DE MESLAY-DU-MAINE
(Mayenne)

Dès septembre 1939, 2 000 Allemands et Autrichiens arrivent à MESLAY en provenance du Centre de Rassemblement de COLOMBES.

Installées sur un terrain boueux au lieu-dit "Les Rochères", les tentes ne résistèrent pas à la tempête à la mi-octobre. Il fallut alors procéder au transfert, fin octobre, sur un autre terrain au lieu-dit "La Poterie". On put alors y construire des baraques en dur, mais les conditions de vie y demeurèrent des plus précaires.

Le camp était placé sous le contrôle du Bataillon de Garde des Etrangers n° 4.

Le camp fut supprimé en avril 1940.

Lettre d'un interné du 7-11-1939.

Verso de la lettre

Grâce à l'obligeance de M. A. GEDOVIUS qui a bien voulu me confier une correspondance adressée à cette époque à son père, M. H. GEDOVIUS (1911-1979) - producteur de radio, introducteur du jazz en France avec Hugues PANASSIE, directeur artistique de Radio-Cité et Radio 37-, des précisions intéressantes m'ont été données sur le Camp de MESLAY. Je lui en exprime toute ma gratitude.

Ce courrier émane d'un interné ex-autrichien, Georges BACHRICH, qui y fait état de toute la souffrance physique et morale endurée au cours de cette épreuve. En voici quelques éléments.

Dans une lettre adressée à la LICA (Ligue Internationale contre l'Antisémitisme), à PARIS, il rappelle les conditions de son arrestation le 11 septembre 1939. Convoqué pour quelques heures au Stade de COLOMBES pour une vérification de ses papiers d'ex-Autrichien, il n'en repart pas et connaît les affres de longues nuits passées sur les bancs en béton du stade. Quelques jours plus tard, il est transféré avec près de 2000 de ses compatriotes au CAMP DE MESLAY. Plusieurs nuits sont alors passées sur l'herbe, rien n'ayant été prévu pour l'arrivée d'un tel nombre d'internés.

Le 29 octobre 1939, il précise que le camp entouré de fil de fer barbelé se trouve dans un champ et qu'on y enfonce dans la boue jusqu'aux chevilles. Les conditions de vie sont des plus précaires :

Les baraques sont très "aérées" et, dans la nuit, il y a de drôles de tempêtes et orages parfois. Nous avons un peu de paille par terre et la lumière c'est une lampe de poche Wonder. Il fait froid et l'hygiène est nulle car on ne peut pas se laver comme il faut. Nous portons jour et nuit le seul costume que nous avons sur nous. On ne peut écrire qu'une fois par semaine seulement.

Carte de Georges BACHRICH du 6-11-1939
CAMP DE MESLAY-DU-MAINE

Comme tous ses compagnons d'infortune, Georges Bachrich ne comprend pas le châtiment qui lui est  infligé par la France, sa deuxième patrie.

Je me sens tellement inutile à rester là à ne rien faire, alors que je pourrais rendre d'innombrables services et de bon coeur à la France.

Il se console comme il peut avec ses amis :

Nous sommes souvent ensemble et cela nous change un peu de nous voir pomper le contenu d'une latrine pleine dans un bidon pour faire de la place ! Ah la la !

En dépit de certificats de loyauté accompagnant une demande de libération adressée à la Commission Interministérielle de Criblage à PARIS, le 28 décembre 1939, aucune réponse ne lui est donnée. Une demande d'admission dans la Légion Etrangère lui est également refusée.

Mais, après cinq mois de "criblage", les internés sont enfin classés prestataires mais, n'étant pas affectés, ils restent au Camp de MESLAY.

Des millions d'heures de travail sont perdues de la sorte.

Carte postale du 6-5-1940 émanant de Georges BACHRICH
affecté comme prestataire à l'Armée Anglaise.

Dans une carte du 6 mai 1940, Georges BACHRICH annonce :

J'al reçu enfin mon appel sous les drapeaux et j'ai été affecté, à titre de prestataire, à l'Armée Anglaise.

En témoigne la carte reproduite ci-dessus, comportant, outre un cachet de la censure anglaise et un cachet de la POSTE AUX ARMEES, le cachet du FIELD POST OFFICE 66 de CHERBOURG, desservant la Base d'Opération n° 1. L'adresse de l'expéditeur semble avoir été découpée par la censure.

Ainsi se poursuivait le chemin d'un homme, ami inconditionnel de la France, après huit mois éprouvants passés dans un camp français. En guise de conclusion, citons encore Georges BACHRICH. C'était en février 1940 :

Les Autorités militaires, en nous rassemblant dans notre enceinte de fils barbelés déclarent "ben les soldats de la Ligne Maginot n'ont pas à rigoler non plus". Les soldats combattent pour leur patrie et moi je ne demande pas mieux : je me suis constitué volontaire déjà avant le début des hostilités. Les soldats derrière lesquels la patrie se dresse ont déjà cet énorme réconfort. Aussi tout est fait pour soulager leur sort en tout et en toute circonstances.  Et nous ?

Combien de fois ces internés n'ont-ils pas entendu :

Que voulez-vous, c'est la guerre !

CAMP DE MESLAY-DU-MAINE
Carte postale d'un interné autrichien du 23-9-1939
à destination de Paris

Cette carte postale émanant d'un autre autrichien interné à MESLAY comporte, au verso, un cachet violet ainsi libellé :

41e REGIMENT REGIONAL
BATAILLON DE GARDE DES ETRANGERS N° 4
Le Commandant
Mise à jour
02/03/2008